vendredi 11 juin 2010

Saveur Inconnue


Chapitre 4 : Février




« Je ne me soucie pas de faire de belles phrases, j'écris c'est tout. »

Il en est encore abasourdi.

En dévalant la piste froide et immaculée, il retourne mentalement les pages de ces derniers jours.

Ils se parlent facilement, sans ambiguïté.

Elle n'a peur de rien.

Un je-ne-sais-quoi quoi de… vivant.

Il la rencontre rapidement, marchant entre les étroites ruelles de Montmartre, elle le met vite à l'aise.

Autour d'un café, elle lui raconte.

Tout.

Son instinct, ses envies, sa vie.

Elle a une façon de raconter… elle anime tout ce qu'elle touche de près ou de loin.

Elle lui confie innocemment ses peurs, ces craintes.

Il entre dans sa vie comme dans une belle photo d’Izis. Elle rend pittoresque ce qui ne l'est pas pour un autre.

Il tente de plonger ses yeux gris dans le regard fuyant de la lycéenne.

Il y croirait presque. Derrière son sourire angélique, il y a une autre fille. Il en est maintenant sûr… les habitués de la tristesse la reconnaissent facilement.

Cette façon qu'elle a de ne jamais se laisser prendre à revers.

Les nombreux regards discrets qu'elle jette au dessus de l'épaule du jeune homme ému.

Elle finit vite son café et s'attache les cheveux. Comme si elle n'avait rien à cacher. Comme si...

Elle était heureuse.

Qui y'a-t-il derrière cet imperceptible regard ?

Elle est si jolie...

Quand, sur le quai du métro, elle lui tend sa nuque pour qu'il y dépose un compliment sur son parfum, l'idée ne lui vient pas même d'y déposer autre chose.

Il pense... il ne cherchera pas aujourd'hui ce qui se cache en elle... juste aujourd'hui... laisser la magie de cet après-midi s'évaporer en douceur comme la rosée du printemps.

Laisser son souvenir s'effacer dans la nuit, laisser le soleil s'éveiller et les étoiles fleurir.

Laisser le ciel emporter, dans un mistral aux senteurs d'été, son portrait à peine brossé.

Il ferme les yeux.

Il n'entend même plus la foule amassée autour de lui, les regards inquiets... il est allongé par terre. Son bras est peut-être brisé. Il ne sent plus rien.

« Je ne me soucie pas de faire de belles phrases, j'écris c'est tout. »

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